RICARD CANCANE A CANNES / 3

Publié le par ricard burton

60_cannes_festival_my_blueberry_nights_screening_liz_hurley.jpg- Ricard, c'est obligé, tu ramènes ton cul jusque Cannes. T'es un blaire si tu viens pas. Y'a qu'Arnaud Aubron qui vient pas tellement il est obligé d'apprendre à s'habiller autrement et à porter des grosses bagouzes en féraille pour qu'on comprenne qu'il s'occupe des Inrocks à présent. Ricard, y a même des arméniens à Cannes, ils ont ouvert un tas de concessions. Aller, fais pas le con.


Je regrettai presque d'être dans le sud ce matin et d'avoir écouté mon psychanalyste parce que je m'étais fait voler pendant la nuit mon sac à dos, et tout ce qu'il contenait, par les saisonniers sans papiers qui partageaient ma piaule à Marseille. Il y a donc aussi des voleurs chez les pauvres. Résultat, j'ai resquillé pour rejoindre Cannes, la peur au bide. Très franchement, vu ce qui m'attendait en projection, j'aurais mieux fait d'aller m'enquiller le programme d'un multiplex du côté d'Ivry. Hier je me plaignais mais aujourd'hui n'est rien en comparaison de l'ablation qu'il faudrait se faire pour ne pas souffrir devant un tel spectacle de désolation. Evidemment, il y avait bien JLG, indéboulonnable Godard qui n'en finit plus de tourner dans la bouche de tous les petits génies apprentis qui n'en dépasseront jamais le stade anal. Godard est juste une plaie qu'on se plaît à aimer. Comme cela, parce qu'il est vieux, la voix chevrotante, on a pitié de lui comme de tous ses vols qu'il fait pour construire ses films. « Film Socialisme » n'échappe en rien à ce triste constat. On n'en revient presque à regretter Truffaut dont, pourtant, le dernier bon film remontait aux « 400 coups ». Seul son nouveau coup de misanthropie, à ne pas venir présenter son film ici à Cannes, aura plus de force que ce nouveau pensum dont il voulut bien nous affubler. Alors en sortant de la salle on reste avec des images, des pensées, celles de vite rejoindre un bar et vite se souler. Je fus d'ailleurs, par surprise, embringuer par des types que je ne connaissais pas dans une villa, pour la fête Europacorp. Apparemment ils manquaient de diversité, trop de blanc me dirent-ils et Europacorp doit avoir son quota de noirs, d'arabes, de banlieusards car sinon, ils ne seraient plus en phase avec leur communication. Bref, je me retrouvai là, au milieu de ces gens plutôt sympathisante qui me claquent dans les mains, me parlent en verlan, se croient en plein Sarcelle juste parce que je ne suis pas blanc. La fête de ce soir ? Ils fêtaient le million d' « Adèle Blanc sec ». Ces trous du cul tentaient de faire croire à l'opinion que ce million était bel et bien une réussite pour l'adaptation d'une bande dessinée réputée compliquée. J'étais content d'être là-bas à attendre la venue de Louise Bourgoin. Ma femme de ménage m'avait demandé expressément de lui donner quelques gifles ou coups de coudes dans la mâchoire si je la croisais. Mais elle ne vint jamais. Il paraitrait qu'elle ne supporte pas bien la célébrité et qu'elle aurait tenté de mettre fin à ses jours. Luc Besson tenta de camouflé l'information en se jetant dessus.


Cela tombait bien ce suicide, parce qu'il y avait le Kitano et je ne voulais pas le rater. Même si je considère qu'il est moins bon depuis qu'il s'est pris en arbre en moto le Kitano, ces films sont agréables car ce sont les seuls longs asiatique dans lesquels je reconnais un personnage, lui. Les autres, je galère trop à les identifier tant ils se ressemblent et tant le réal se casse pas le cul à les différencier. Je l'aime bien Kitano, il a l'air gentil et il me fait de la peine avec ses tiques constants alors je ne vais pas défoncer son film, il le fait assez bien lui-même en conférence de presse. Et puis, il est à l'image du Festival, il ne bouge pas, c'est toujours pareil. Les yakuzas, les ballets sanglants, patati, patata, c'est toujours le même fatras. Je n'ai pas à me plaindre pourtant, je continue à rentrer où je veux. Il y a des projections parallèles en veux-tu en voilà de jeunes glandus qui viennent à Cannes comme s'ils venaient braquer la BNP. Les mecs haranguent dans la rue, te proposent des séances spéciales, ils te disant avoir réalisé « Heat » ou « le Parrain », c'est filmé à la Courneuve, en scope HD, c'est nul, avec Didier Morvile en guest, c'est plein d'effets foireux, c'est sans avenir et c'est tant mieux. Mais ce ne sont pas les pires, il y a aussi les artistes, ceux qui se baladent avec leurs courts-métrages sous le coude et vous cassent la gueule si vous ne leur dites pas que leur film est bien. Ils sont dangereux et surtout ils ont la quarantaine.


« Le festival de Cannes c'est le mix parfait entre le cinéma exigeant, d'auteur, et le populaire »... jusqu'ici, je n'ai vu que le reflet d'une production dont la tangente déviante est à l'image d'un cinéma mutant, d'un cinéma trisomique dont se délectent des critiques qui le sont tout autant. Je m'entretiendrais bien avec certains, ceux qui sont dans leurs coins, ne parlent à personne, prennent des notes dans tous les sens, semblent être là pour bosser et non pas bêtement joindre l'utile à l'agréable. Pas ces critiques qui s'appellent la veille de leur voyage à Cannes pour se demander l'un, l'autre s'ils ont amené des capotes ou du lubrifiant pour se faire correctement enfiler. Il n'y pas d'éthique du critique, juste des petits brailleurs dont l'égo est à l'image de leur niaiserie.

Je passe donc mon chemin et avec cette histoire de train, je suis en retard, il y a le Inarritu qui va commencer. Je m'en serais passé sans problème. Les mexicains sont des vendus, tous, à la cause étasunienne, c'est entendu. Lui, plus qu'un autre, on sait, même s'il feint de rester dans son pays pour réaliser des films, il se branle sur celui aux 50 états qui a brulé le sien, violé ses soeurs. Il se branle dessus car c'est de là que vient son savoir-faire et non pas de son pays en voie de déracinement d'où aucun grand cinéaste n'est sorti. Certains s'y sont installés comme Bunuel mais personne n'en est sorti avec sa propre identité. Pourquoi ? Les Etats-Unis ont veillé à propager leur discours, leurs films, leur musique. Les Etats-Unis ont veillé à ce que ce pays soit enfoui jusqu'au cou de leur identité jusqu'à ce que la leur, véritable, n'existe plus. Alors bon, on sait que lorsqu'on va voir un Inarritu, on va voir un Kasdan, un Altman, un Badam. On va voir un film américain en fait et non pas un film mexicain même si le réalisateur déclare à propos de son film « ces films qui vous entrainent vers des territoires dont on craint ne jamais revenir ». De toutes les façons, rien qu'à voir sa posture à ce réalisateur, on comprend bien que c'est un parvenu, un mercenaire à la solde des Etats-Unis même s'il veut nous faire gober qu'il garde son indépendance factice en plastique, juste bonne à exciter le mexicain de base.


Je suis donc un peu dépité par cette sélection. Je suis même pris par un tas d'angoisses sournoises. Heureusement, il y a l'équipe des Cahiers du Cinéma un peu plus loin. Il paraît que la nouvelle équipe en place est formidable et qu'ils ne sont pas aussi cons qu'on veut bien le dire. Je vais me rapprocher d'eux et voir si, même sous un pseudo, je pourrais faire quelques trucs pour leur mag décati. Il n'y aurait pas de quoi pavoiser de se retrouver au milieu d'une telle farandole de branleurs mais l'heure tourne et j'ai besoin d'argent, ne serait-ce que pour m'offrir une barquette de frites ou des carambars pour les faire fondre contre mes gencives, le temps des prochaines projos.

 

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