RICARD CANCANE A CANNES / 6

Publié le par ricard burton

lelouch-godard-truffaut-malle-polanski.jpg« Comme on se retrouve ! » me glissa le moustachu ancien rédac-chef de « Studio » qui passa sa tête sous la porte des WC où je faisais mes besoins. Il n'attendit point la fin de mes commissions pour me proposer de venir vider son mini-bar à l'hôtel Miramar avec un type des « Inrocks », un peu gras, la voix légèrement féminine, très tape-système, fin de règne, début d'hybride, officiant dans l'émission ciné de Beigbeder sur Canal. La copie du « Masque et La Plume » mais qu'avec des journalistes issus de torchons type «  Le cinéma pour les Nuls ». Pourquoi pas me dis-je, on ne sait jamais où le bon coup se trouve. En plus de cela, il me promettait un toit jusque la fin de la manifestation et une gamelle de maïs à chaque repas.

 

Au matin suivant, le petit gros des « Inrocks » me déclamait du Peter Sotos en me caressant le mollet.

 

  • Tu crois que je pourrais travailler pour les « Inrocks » lui demandais-je, décomplexé ?

  • Je vais en parler à qui de droit mais tu sais nous avons un quota au journal: les gays, les arabes, les pays émergents, les maniaco-dépressifs ont la côte en ce moment. Je vais pas te mentir mon petit Kinder, en ce moment les noirs, c'est pas ça. On fait plutôt dans le palestinien, tu comprends ? Disons que politiquement, cela nous place plus à gauche quand les noirs, plus à droite. Tu sais bien que la France et l'Afrique, c'est tendu... comme moi...

 

Je lui promis que je remonterai à Paris vivre avec lui et sa mère. Je descendis sur la plage prendre un ice-tea et faire un point sur mes notes, les films que j'avais vus jusque là. Cela me réconfortait dans ma pensée: le téléchargement, ils le méritent tous ces bouffe-bites. Pas un seul film à sortir de ce panier de crabes affamés. Je me réjouissais pourtant que Guillaume Canet ne soit pas dans la sélection comme il le fut, pendant longtemps, annoncé. Mon psychiatre dut me mettre sous Sulfarlem ® durant toute cette période d'attente. Je n'ai rien contre Guillaume Canet, après tout, il n'est pas pire qu'un Henri Guybet à son époque, mais je le trouve toujours pas crédible dans ses rôles, trop jeune, trop frêle. Il aurait peut-être eu sa place cette année face à ce Tavernier dont on comprend maintenant pourquoi il eut tant de mal à se financer.

 

Selon les dernières rumeurs, la Palme n'aurait toujours pas montré le bout de son nez. A tel point que Jacob et Frémaux se renseigneraient pour intégrer le « Robin des Bois » de Scott en compétition officielle pour donner de quoi ronger au jury car depuis le début, c'est bien ce film qui aurait les faveurs des votants.

 

La bonne nouvelle d'aujourd'hui c'est que La Semaine de la Critique prend fin ce soir même après nous avoir infligé une sélection digne de celle de Deauville ou une ville à la con de ce calibre. Il serai bon que les festivals se donnent la peine de faire émerger des films intéressants au lieu, simplement, de pomper des subventions aux municipalités dans le seul but d'engraisser des gens qui ne méritent que des coups de fusils. Le poppers de la veille me donne des aigreurs d'estomac.

 

Au programme aujourd'hui un film italien sur lequel je ferai impasse. Ce cinéma est mort avec « Et Vogue le Navire », pas besoin de le ressusciter.

Le Loach par contre arrive en embuscade, imprévu, il est très beau, poétique, un film de très grande envergure et d'une classe inestimable. Il a des chances de finir au palmarès. Les gens pleuraient dans la salle. Un grand moment d'émotion que je souhaite à tout le monde de connaître un jour dans la vie.

 

Enfin, je ne peux que me réjouir du prochain film à passer, un américain, avec Sean Penn, le dernier vrai mâle du cinéma comme l'étaient Rock Hudson, Burt Lancaster ou Cary Grant à leurs époques. Je vous raconterai plus tard mais je pense que cela va sentir le foutre dans le Palais des Festivals.

 

Ce soir on verra à quelle sauce je serai mangé. Heureusement que mes parents ne savent pas lire et ne vivent pas en France pour se rendre compte de toute ces avanies que je subis dans le simple but de continuer à vivre, sans dignité, juste pour dire que par là aussi, je suis passé.

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